Réseau des collectivités Territoriales pour une Économie Sociale et Solidaire

Rapport de la Cour des comptes sur les soutiens publics à l'ESS
Publié le 17 septembre 2025 - mis à jour le 29 septembre 2025

Rapport de la Cour des comptes sur les soutiens publics à l'ESS

Le rapport très attendu de la Cour des comptes sur les soutiens publics à l'économie sociale et solidaire est sorti ce 18 septembre. Au-delà du panorama des flux financiers présenté pour la 1ère fois, le rapport émet plusieurs recommandations afin que la France se donne un cap clair pour identifier l'ambition accordée à cette économie basée sur la coopération, la démocratie interne, la primauté de l'humain sur le capital. Ce rapport fournit de nombreux éléments précieux pour l'élaboration en cours de la stratégie nationale de l'ESS, qui devrait être présentée d'ici la fin de l'année selon les recommandations de l'Union Européenne. Retrouvez en cliquant ici la contribution du RTES à l'élaboration de la stratégie nationale de l'ESS

Ce rapport répond à une demande formulée sur la plateforme citoyenne des juridictions financières. Il établit un panorama des soutiens financiers apportés par l’État, les branches de sécurité sociale, l’Union européenne et les collectivités territoriales aux acteurs de l’économie sociale et solidaire sur la période 2018 à 2024. Patricia Andriot, vice-présidente du RTES, était membre du comité d'experts.

Retrouvez le rapport ici

"Entre 2018 et 2024, les aides versées aux acteurs de l’économie sociale et solidaire par l’État, ses opérateurs, les branches de sécurité sociale et les collectivités territoriales représentent des enjeux financiers importants, illustrant le rôle central que les acteurs de l’économie sociale et solidaire jouent pour faire face à des besoins sociaux croissants. Ces soutiens, y compris dépenses fiscales et aides aux postes et contrats aidés, s’élèvent à 16 Md€ pour l’État en 2024 (hors dépenses des opérateurs qu’il n’a pas été possible de consolider) et à près de 6,7 Md€ pour les collectivités territoriales en 2023."

16 milliards d'euros ont été versés par l'Etat, dont la moitié en subventions directes, majoritairement dirigées vers les associations, et surtout celles qui emploient des salariés. Ces aides se concentrent sur quelques secteurs d'activités, qui ressemblent beaucoup à des délégations de service public, remarque la Cour des comptes, comme par exemple l'hébergement d'urgence (18% des subventions), l'enseignement privé sous contrat (15%) ou encore l'accompagnement social, l'aide alimentaire et l'accueil des réfugiés. Ces 16 milliards d'euros intègrent  4,6 milliards de dépenses fiscales, le montant des réductions d'impôts liées aux dons des particuliers et des entreprises à ces associations, fondations ou coopératives reconnues d'utilité publique. L'enveloppe comprend aussi des aides pour certains types d'emplois, notamment l'insertion par l'activité économique ou les aides à l'emploi pour les travailleurs handicapés (ESAT principalement). Le rapport souligne la baisse de financement spectaculaire des contrats aidés de 80%. Enfin, les subventions identifiées de l'Etat comprennent également les financements passés par les opérateurs publics de l'Etat, comme l'ADEME par exemple pour des projets d'économie circulaire liés à l'ESS.

Le rapport met en évidence le rôle croissant des collectivités territoriales. Leurs aides ont augmenté de 25 % en 5 ans, pour atteindre 6,23 milliards d'euros en 2023. Ces aides bénéficient à 95 % des associations dans le secteur de la santé, de l'action sociale, l'enseignement, les arts et les loisirs.   

Autre financement identifié par le rapport, les fonds européens comme le FEDER ou le FSE+, en soulignant que ces   guichets constituent un véritable parcours du combattant pour les petites structures qui n'ont pas le personnel administratif pour remplir les dossiers de demande d'aides et de subvention. Le besoin de simplification est important, juge la Cour des comptes, qui propose d'interconnecter les différents portails de demande d'aides

"Malgré une présence dans tous les territoires et un rayonnement international de la définition française de l’économie sociale et solidaire, celle-ci souffre d’un déficit de visibilité et de notoriété au plan national".

La Cour invite à promouvoir les spécificités de ce mode d’entreprendre, notamment au moyen du guide des bonnes pratiques des acteurs de l’économie sociale et solidaire élaboré  en 2017, en application de la loi du 31 juillet 2014. Il constate l’échec du changement d’échelle de l’économie sociale et solidaire et de la mesure de ses impacts sociaux.

"La Cour invite l’État à  accompagner  (les acteurs de l'ESS) dans l’élaboration de référentiels communs d’évaluation de leurs impacts sociaux et sociétaux selon leurs domaines d’activités."

Ce rapport constitue une étape décisive dans la reconnaissance de l’ESS qui, en tant que mouvement d’entreprises et force de la société civile, se situe souvent à l’interface entre la puissance publique et le marché. Les acteurs de l’ESS affichent leur grande détermination à prendre appui sur ce rapport pour mettre en œuvre au plus vite les recommandations qu’il formule et nourrir la Stratégie nationale de développement de l’ESS qui doit bientôt être adoptée.” explique Benoît Hamon, Président d’ESS France, dans un communiqué de presse d'ESS France.

Lire le rapport ici

Récapitulatif des recommandations :

Mettre en valeur le poids économique et les apports de ce mode d’entreprendre

  • Promouvoir dès l’adoption de la stratégie nationale de soutien à l’économie sociale et solidaire en 2025 les spécificités du mode d’entreprendre de l’économie sociale et solidaire, notamment au moyen du guide des bonnes pratiques prévu par la loi du 31 juillet 2014
  • Faire aboutir d’ici 2027 le projet de compte satellite avec l’Insee et encourager les acteurs à élaborer des référentiels communs d’évaluation de leur impact selon la politique publique concernée 

Stabiliser le pilotage de la politique de soutien à l’économie sociale et solidaire et renforcer la coordination entre l’État et les collectivités territoriales

  • Assurer un pilotage stable de la politique de soutien à l’économie sociale et solidaire en tant que mode d’entreprendre et donner au délégué chargé de l’économie sociale et solidaire un positionnement interministériel d’ici 2026
  • Co-construire en 2025 avec les représentants des régions et des intercommunalités la stratégie nationale de soutien au développement de l’économie sociale et solidaire

Améliorer l’organisation et l’efficacité des services de l’État chargés de l’économie sociale et solidaire

  • Outiller en 2026 les greffes des tribunaux de commerce pour le contrôle des critères d’appartenance des sociétés commerciales à l’économie sociale et solidaire au moment du dépôt de leurs statuts
  • Interconnecter d’ici 2027 les portails de demandes de subvention ou de réponse à des appels à projet lancés par l’État en direction des acteurs de l’économie sociale et solidaire et mutualiser les pièces justificatives issues de leurs dossiers de candidature
  • Clarifier en 2025 le rôle et les missions des correspondants régionaux au sein des services déconcentrés de l’État et renforcer l’animation territoriale des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire en harmonisant et en hiérarchisant leurs missions au regard de leurs moyens
  • Adapter en 2026 les modalités de financement des pôles territoriaux de coopération économique à leurs besoins et à leur rythme de développement 

Lever les freins à l’accès aux financements des acteurs et amplifier la communication sur les dons et fonds solidaires

  • Revoir d’ici 2026 la doctrine de Bpifrance pour intégrer les titres participatifs et associatifs dans les quasi fonds propres et ainsi favoriser l’accès des coopératives et des associations aux financements
  • S’assurer que les établissements financiers renforcent la communication dès 2025 sur les dons solidaires auprès des détenteurs de livret de développement durable et solidaire et sur les fonds solidaires auprès des détenteurs de contrats d’assurance-vie