Réseau des collectivités Territoriales pour une Économie Solidaire

Le RTES a interviewé Christiane Bouchart, maire adjointe honoraire à Lille, sur l'intérêt du RTES pour les enjeux européens et internationaux en tant que présidente du réseau jusqu’en 2019
Publié le 26 avril 2022

Interview de Christiane Bouchart, maire adjointe honoraire à Lille, sur l'intérêt du RTES pour les enjeux européens et internationaux en tant que présidente du réseau jusqu’en 2019

Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots votre parcours d'élue ?

J’ai été pendant 19 ans élue à la ville de Lille en charge de l’économie sociale et solidaire (ESS), mais également vice-présidente du développement durable à la Métropole Européenne de Lille jusqu’en 2020, une compétence que je croisais systématiquement avec l’ESS. Il y a 20 ans, j’ai participé à la création du RTES en 2002, réseau dont j’ai pris la présidence quelques années après et ce pendant une quinzaine d’années, jusqu’au passage de relais avec Mahel Coppey en octobre 2019. C’est en tant que présidente de la fédération régionale des Cigales que je suis arrivée dans le monde de l’ESS, sans connaître forcément à l’époque toutes les facettes et toutes les dimensions de cette nouvelle économie.

Le RTES s'est intéressé depuis sa création aux questions européennes et internationales. Pour quelles raisons et avec quels enjeux ?

En 2001, de nombreux.ses élu.e.s se sont retrouvé.e.s en charge de l'économie sociale et solidaire, sans trop savoir l’appréhender. C’est dans ce contexte que le RTES a été créé, avec pour objectif de faire réseau, être un centre de ressources, un lieu d'échange de bonnes pratiques et de partage d'expériences, autour par exemple de la co-construction des politiques publiques avec les acteur.rice.s locaux.ales.

Au fil du temps, on s’est aperçu que des élu.e.s n’avaient pas seulement en charge l’ESS mais aussi l’insertion, la culture et pour certain.e.s la coopération internationale. C’est face à ce constat que le RTES s’est rapidement intéressé aux questions européennes et internationales car naturellement, l’ESS prône cette coopération et cette mutualisation pour garantir la protection et la cohésion sociale. De plus, ce modèle est transversal à l’ensemble du champ des politiques publiques, et notamment celui de la coopération décentralisée et de la solidarité internationale. Naturellement, l'engagement des politiques publiques dans la coopération décentralisée ouvrait de nouveaux horizons pour faire avancer les liens directs de solidarité entre les communautés humaines et la démocratie dans les territoires. La guerre actuelle en Ukraine nous montre à quel point ces conditions sont indispensables pour garantir des solutions pérennes, porteuses de justice sociale et capables de satisfaire tous les besoins primaires (accès à l’eau, à l’énergie, aux soins et à l’éducation). 

Cette mobilisation directe des populations est un levier déterminant pour gagner le pari des Objectifs du Développement Durable (ODD) à atteindre d’ici 2030. On sait bien que la stabilité mondiale face au changement climatique est parfois fragile et qu’il est urgent d’agir, d’où l’importance de redistribuer les richesses et cela à une échelle locale, mais aussi nationale et internationale, voire mondiale. Là aussi, il est nécessaire d’avoir des réponses co-construites avec les réseaux d’acteur.rice.s. C’est pourquoi le RTES, très rapidement, a adhéré au Réseau Intercontinental de Promotion de l'ESS (RIPESS). Dès 2005, aux côtés de Henri Arevalo notamment, le RTES a participé à la première rencontre internationale sur la globalisation de la solidarité à Dakar, rencontre qui avait pour thème “Renforcer le pouvoir d’agir des peuples”. Plus tard en 2007, le réseau organisait une rencontre à Lille avec une déclaration pour la reconnaissance de l’ESS, en lien déjà avec l'intergroupe du Parlement européen. Ensuite, il y a eu un enchaînement de plusieurs rencontres : au Luxembourg en 2009, à Strasbourg en 2014, des engagements à Montréal en 2015, la signature avec les gouvernements locaux de Corée en 2017 et la rencontre de Bilbao en 2018. Le RTES est associé depuis de nombreuses années aux actions de réseaux tels que le GSEF, le Fond mondial des villes, l’association internationale des maires francophones, les Amis du Printemps arabe ou encore Unis France. 

Le RTES est aujourd’hui connu et reconnu par ces réseaux internationaux, preuve de l’importance de faire réseau pour faire reconnaître l'ESS à une grande échelle. 

Un des enjeux aujourd’hui, c'est la reconnaissance de la diversité des acteur.rice.s de l'ESS et de la multitude des clés d’entrée possibles de l'ESS dans les politiques publiques. Même si chaque pays a ses spécificités, on observe des similitudes dans les problématiques rencontrées par les collectivités. Ce sont les échanges et les partages d’expériences qui font que ce travail de lobbying fonctionne, y compris en Europe avec des fonds structurels et d’investissement qui forment de vrais leviers à disposition des territoires et sur lesquels ils doivent absolument s’appuyer.